Tempête, tu nous guettes!

Essai par David Garneau

PATIENT STORM DE DANA CLAXTON

Lorsqu'il est question des Autochtones dans les médias populaires, il s’agit habituellement d’histoires de crime, de violence, de pauvreté, d’échec, de la fierté de porter des fourrures et des plumes ou des succès subventionnés par le gouvernement. Les autoreprésentations autochtones, lorsqu’elles ne sont pas des récits grand public, prennent souvent la forme de récitations tordues et autoréflexives du style « de nos jours, que signifie être autochtone? » ou « comment oublierons-nous les préjudices portés à l’égard de notre peuple? » Le métadiscours est révélateur, certes, mais pas très inspirant. C’est ainsi que j'ai pris un petit plaisir à regarder deux jolies femmes autochtones empreintes de confiance discuter entre elles dans la nouvelle vidéo en ligne de Dana Claxton, « The Patient Storm ».1

Les représentations populaires des Autochtones croissent au même rythme que notre population, mais on ne donne pas suffisamment de temps d’antenne au savoir autochtone. On discute du savoir autochtone dans ces cercles, par prétérition en usant de la gestuelle, mais le grand public n’a rarement plus qu’un aperçu du contenu. La résistance face à l’engagement s’explique peut-être par le fait que ce savoir est bien plus que de l’information; ce savoir est ancré dans des pratiques engagées et on ne peut s’en tenir à la lecture et à la réflexion. L’engagement peut être difficile car la vision du monde autochtone traditionnelle contredit la vision qui domine à l’heure actuelle. Elle est métaphysique, profondément écologique et communautarienne.

Photo de production no 1

Lors des cérémonies du calumet, les Anciens nous ont raconté à maintes reprises que le savoir autochtone n’est pas exclusif aux peuples des Premières nations, mais se doit d’être partagé avec le monde entier. Le véritable savoir transcende le particulier, le pays, voir même l’histoire. Il n’en demeure pas moins que parce que les chemins du savoir qu’empruntent les Autochtone sont expérimentaux, rattachés aux communautés et aux rituels, seuls ceux qui souhaitent franchir à répétition les frontières sociales et conceptuelles qui divisent les gens y ont accès. Les objets d’art peuvent servir d'accès à ce savoir. On peut les considérer comme des portails sans risque entre les visions du monde.

J’ai premièrement éprouvé du plaisir à regarder The Patient Storm de Dana Claxton parce qu’on y voit un peuple autochtone qui ne rumine pas à propos du colonialisme ou de l’aboriginalité contemporaine. Ils se contentent d’Être (des Autochtones post-coloniaux et contemporains). Ce n’est pas aussi facile que ça en a l’air. Nous sommes colonisés par un imaginaire qui nous amène à situer les entités autochtones dans des récits et des paysages précis. 2 Toutefois, le travail de décolonisation doit non seulement s’agir de l’élimination du pouvoir et de nous rappeler qui nous étions, mais également d’être qui nous sommes. Peut-être sommes-nous prêts à troquer nos figures de styles et d’échanger notre ironie contre l’allégorie.

The Patient Storm de Dana Claxton est une allégorie des impulsions en compétition chez les êtres humains et dans les sociétés : conservation et changement. À travers les personnages de Storm et de Lightning, Claxton propose dans sa légende un système inspiré par les enseignements et les pratiques des Lakotas (la danse du soleil)3, dans laquelle ces personnages d’apparence opposés deviennent des alliées. La tradition, d’un côté et le désir de l’action et de la nouveauté de l’autre, sont habituellement représentés comme des dichotomies et souvent comme une division générationnelle. « The Patient Storm » caricature cette convention, seulement pour effacer les distinctions et montrer que les traditions et la société moderne ne sont pas incompatibles.

De telles ambitions nobles nécessitent un lieu surélevé et des personnages plus grands que nature. Afin de montrer les femmes telles qu’elles sont et non comme des sujets coloniaux et pour nous montrer le savoir qu’elles représentent comme des connaissances qui outrepassent les cultures spécifiques, Claxton les situe dans un espace lointain. Elles sont des demi-déesses suspendues au-dessus du monde, au-delà des stéréotypes et de l’historicité dans une continuité intemporelle, sans toutefois être séparées de notre monde. Storm et Lightning n’atteignent que leur pleine existence que lorsqu’elles descendent sur terre pour se joindre à son peuple dans la danse du soleil.

Photo de production no 3 : Photo noir et blanc du personnage de Foudre

La scène ne peut être plus simple. Seule une chaise blanche (La Chaise) meuble le décor.4 En arrière plan sont projetés des nuages en évolution : durant la post-production, Claxton a introduit des images de nuages filmés du milieu de la journée jusqu’au coucher du soleil et l’accumulation de nuages d’orage. Au milieu, des images d’étoiles et de spirales célestes. Les personnages sont deux femmes qui personnifient les forces de la nature. Claxton décrit la plus âgée des deux femmes, Storm, comme une « élégante femme patiente et avertie ». 5 et Lightning comme « un filou, une jeune femme fofolle, sexy et cool ». Leurs costumes de couleur brune évoquent un style intemporel nous rappelant la terre; mais la coupe reflète les différents tempéraments et générations : Storm porte un élégant complet coupé aux genoux et Lightning est vêtue d’un pantalon décontracté, d’un T-shirt et d’une veste à capuchon. Ce qui les confond, en dehors de leur costume brun, sont les bandeaux qu’elles arborent aux poignets et aux chevilles que « portent les danseurs du soleil au même titre que la couronne qui décore leur tête, nous explique Claxton. Ils sont [traditionnellement] faits d’une étoffe rouge sacrée et de sauge.... » Les costumes révèlent le traditionnel et la durabilité qui côtoient le contemporain et la mode éphémère. Ce sont des différences, mais non des contraires. Ce thème retentit dans la bande sonore sur laquelle on entend une douce musique intermittente accompagnée par ce qui semble être le son de la crécelle traditionnelle.

L’intrigue est aussi modeste. Storm et Lightning se préparent à descendre sur terre mais sont retardées par les membres de leur groupe. La scène commence par Storm (personnifiée par Samaya Jardey), une femme dans la fin trentaine inclinée vers l’arrière sur une énorme chaise qui ressemble à un nuage. Sa tête penche vers l’arrière, ses longs cheveux noirs pendent au-dessus du sol. Un plan moyen nous montre Lightning (Marie Prince).6 qui est dans la début vingtaine. Les deux femmes discutent. Storm demeure assisse presque toute la durée de la pièce; Lightning tourne autour d’elle. Après sept minutes et 48 secondes, c’est terminé. Seul un cosmos émerge.

Photo de production no 2

On ne voit que Storm et Lightning mais celles-ci font mention d’au moins cinq autres personnages ou groupes. Storm oscille entre la langueur et la détente et une vigilance que révèle son dos droit. Elle se déplace lentement et avec grâce et ses gestes sont fluides et empreints de confiance. Elle est à la fois ferme, imposante et calme. Lightning la décrit comme parfois « bleue » et se plaint du temps qu’elle prend pour se mettre en marche, mais reconnaît qu’une fois qu’elle est lancée, « tourbillons et remous te ramènent à la vie ».

Lightning est énergique. Elle ne s’assoie qu’une fois. Au début, ses mouvements sont détendus mais plus la scène avance, elle devient de plus en plus animée, on croirait presque qu’elle danse. Elle se décrit comme « une grrrrrrl » et une « exquise madame F… gardienne du coup de tonnerre – le roulement zig zig zag ». Son discours rythmé est souvent poétique et curieux. Storm la trouve impatiente et a du mal à suivre son parler saccadé. Storm grimace souvent et ignore Lightning lorsqu’elle est trop obscure.

« Rattling Wings » (ailes grinçantes) et « le peuple de la Foudre » sans oublier « le prince » sont les seuls autres êtres qui ont des noms propres. Lightning fait partie du peuple de la Foudre, mais, en tant que « gardienne du coup de tonnerre » a un statut élevé. Puisque Storm attend « les autres » et retient et corrige régulièrement Lightning, on peut supposer qu’elle est responsable de tout le système et peut-être même qu’elle le personnifie. « Le prince, la marée, » est davantage une allusion qu’un personnage et quoi qu’il en soit, cette référence demeure confuse. Lorsque Lightning parle de lui, Storm est perplexe; ce qui nous laisse croire que soit elle ignore qui il est, soit qu’elle ne saisit pas totalement ce que dit Lightning.

Lightning dégage une énergie sensuelle. Son discours est rythmé et rhymé. « Stormy Storm – fais tournoyer le tourbillon et fait tourbillonner le remous, zig le zag et zag le zig ». Ses mots coulent et dansent pendant que son corps glisse comme si elle dansait. Elle semble souvent ridicule mais tout aussi souvent sagace. Sa référence au Prince est un exemple de moment ridicule. C’est ainsi que Storm semble le percevoir. Mais Storm est clairement répressive et esquive les nombreuses références sexuelles de Lightning. « Suivez le mec. Le prince. La marée. Mouillez-vous, libérez-vous ». La force et le rythme croissants de la marée, qui symbolise le sexe masculin dans cette légende, l’humidité et la marée et la libération semblent être une série évidente de métaphores sexuelles. Storm ne mord toutefois pas. L’énergie croissante, l’anticipation, la frustration et la libération hors champ qui marque la fin est la force élémentale qui conduit l’action du récit.

Lightning spécule que « tous les autres » ou « les autres », soit Rattling Wings et le peuple de la Foudre, sont peut-être en retard car ils sont « pris dans la vallée, la vallée de l’amoooooooooooour ». Une sexualité polymorphe semble ressortir de cette métaphore : « lui et moi, ou toi et lui, elle et lui, ou elle et elle, ou lui et lui et eux et eux… peu importe… » Storm semble perturbée et passe à un autre sujet. Est-elle perplexe face à leur existence ou est-elle au fait de leur existence? Peu importe ce qu’il en est, son esprit est occupé par autres choses et elle aimerait qu’il en soit pour autant pour Lightning. À ce moment, le peuple de la Foudre dégage une chaleur intense au moment où Storm souffle un vent frais.

« The Patient Storm » ne raconte pas à nouveau une histoire traditionnelle, c’est une allégorie contemporaine créative. À l’exception de la météo, que symbolisent ces personnages? Storm est une force qui se déplace lentement, mais qui est toutefois dynamique. Ce n’est pas un orage individuel mais la force qui se cache derrière le phénomène individuel. De façon similaire, Lightning n’est pas une instance de la foudre, mais plutôt la « gardienne du coup de tonnerre », une énergie archétype inépuisable qui se cache derrière toute occurrence spécifique de la foudre. Storm présente deux facettes : Storm, l’orage potentiel, l’énergie florissante qu’elle tente de contenir, comme elle sait pertinemment qu’elle devra vraisemblablement exploser; et Stormy, sa facette complémentaire, violente et générative. Seule Storm figure dans la vidéo. Stormy ne se manifeste que lorsque Storm quitte la scène à la toute fin. Elle explique que Stormy est sa « nature fondamentale » et que des énergies qu’elle ne peut contrôler l’agitent pour révéler sa force irrépressible. « Je dois me manifester et dévoiler ma… ma… nature fondamentale. Personne n’y échappe Cela n’a rien de troublant, ce n’est que la reconnaissance du rythme fondamental de l’univers.

Storm est régie par plusieurs forces. Lorsqu’elle est Storm, elle est conservatrice, dirigeante et régulatrice, gardienne du protocole. Elle se conforme aux règles et obligations qui ont préséance sur elle. À ces principes « civils » s’ajoute une force égale, la facette Stormy, que l’on reconnaît au tournoiement et au tourbillonnement, à la danse et au plaisir. Storm et Stormy ont fort probablement la même énergie, mais à l’état stable, l’énergie requise est moindre donc l’endurance est meilleure; tandis qu’à l’état actif, l’énergie se dissipe plus rapidement et prend moins de temps à se modérer. Pour décrire leur caractère métamorphosé une fois qu’elles présentent leur autre facette, Lightning utilise le mot « turbulence » que Storm rejette violemment dans son seul excès de colère : « Turbulence! Tu nous appelles ainsi? Non ma chérie, pas turbulence… Nous sommes la clameur glorieuse dans le ciel » La Storm et la danse ne sont pas une perturbation mais le magnifique visage heureux d’un continuum.

Avant la danse, Storm est calme et patiente. Elle est pratiquement conservatrice, elle se retient, calmement, elle attend le bon moment. Il n’empêche que lorsque le moment se présente, elle se laisse aller, elle se relâche pratiquement, elle devient Stormy. Storm incarne la tradition. Les personnes traditionnelles partagent un aspect conservateur, les enseignements et les rituels qui les unissent. Parallèlement, les sociétés traditionnelles prévoient un moment et un lieu pour l’extasie, les rituels, les danses, les visions, sans oublier les jeûnes et les festins qui animent et libèrent l’énergie spirituelle et physique.

Lightning est nouvelle à cette dualité. Même si elle est attirée par l’action impulsive de la jeunesse, elle laisse les aînés veiller sur elle. Elle évolue entre les joyeux convives de la vallée, un groupe et des activités qu’elle semble bien connaître et d’où elle vient peut-être de surgir et Storm qui est plus mature. Elle exprime sa volonté de passer de la jeunesse à l’âge adulte en étant la première du groupe à se placer aux côtés de Storm. Symboliquement, elle va même jusqu’à se glisser sur la chaise ou le trône de Storm pendant un moment, comme pour se sentir adulte. En tant qu'aînée, Storm est souvent agacée par l’impatience de Lightning et par son incompréhension, mais apprécie son arrivée ponctuelle ainsi que son énergie enjouée et revigorante.

Contrairement à Lightning, son faire-valoir, Storm est moins énergique et plus mature. Cependant, lorsque qu’elle se remue sur sa chaise pour trouver la bonne position, pour finalement s’étaler, on peut y voir une certaine sensualité. Ses mouvements laissent croire qu’elle aime danser, mais, il y a un temps pour chaque chose. Le corps de Lightning est moins contrôlé. Elle tente de contenir son énergie mais se laisse constamment aller dans la danse. Elle tente de contrôler son langage mais retombe toujours dans la poésie.

Les derniers personnages sont « le peuple », les humains dont Storm s’apprête à visiter. Les premières paroles de Storm étaient : « Si nous nous ne manifestons pas, c’est que quelque chose ne tourne pas rond. Le Cosmos a perdu la raison, certains diront ». Elle n’est pas agent libre; elle est régie par la force de la tradition et la nécessité inconsciente de sa nature. Le Cosmos représente la nature des choses mais également leur signification. L’absence de ces manifestations récurrentes, à la fois naturelles et sociales (la foudre et la danse) nous annonce que « quelque chose ne tourne pas rond ».

Le terme le plus ambigu de la vidéo est « les autres ». Parfois « les autres » est une référence à la (probablement) orgiaque Lightning et les camarades du Vent; à d’autres moments, c’est une référence au « peuple ». Les « autres » dans le sens de « peuple » se divisent en deux groupes : les mortels qui participent à la danse/orage et ceux qui résistent. De plus, selon Claxton, « le peuple » évoque les non-croyants et ceux qui s’opposent aux Autochtones en général. Mais la phrase « le peuple s’est opposé à nous pendant si longtemps » désigne également « les Autochtones qui sont devenus chrétiens au point de craindre leurs propres pratiques traditionnelles et spirituelles ». Lightning explique : « sacrés petits froussards. Leur savoir ne s’en est pas bien tiré face à la sagesse. Imaginez cela. Leur position d’opposition les rend grands,… même si ce sont de petites boules de poil effrayées. MAIS. ah!!!... pas suffisamment grands pour voir… la certitude. Peut-être sont-ils aveugles… leurs yeux sont absents, leurs yeux sont fermés, fermés, fermés! » Dans la cosmologie, tout le monde, idéalement, l’être humain, la nature et le divin, seraient propulsés dans la danse, « ce moment de connectivité » où toutes les « natures fondamentales » sont exprimées et ne font qu’un. C’est l’extase; « la clameur glorieuse »!

Storm et Lightning sont des natures complètes et complémentaires : physiques et métaphysiques; responsables, mais à la fois sensuelles; traditionnelles et extatiques. Leurs rivaux possèdent le savoir mais pas la sagesse. Lightning propose en outre que leur statut découlerait de la négation. Il y a lieu de croire qu’ils rejètent le plaisir extatique, de se laisser aller dans un rituel collectif, dans une croyance métaphysique. Alors que le matérialisme des autres les élèverait à un aspect, il ne les rend pas suffisamment grands pour voir à travers ce royaume d’une grande richesse. Pour Lightning, ce refus de la spiritualité est soit une ignorance tragique ou une ignorance volontaire.

Storm et Lightning prennent part à un autre type de savoir (le savoir autochtone) qui permet d’atteindre l’extase, de disparaître dans la danse. Storm dit, « ceux qui possèdent le savoir se joindront à nous et les autres attendront d’être prêts ». Lightning répète, « Joigniez-vous à nous, ceux qui SAVENT… préparez-vous à partir… Jusqu’à ce que les autres soient prêts, ils devront attendre ». Ce savoir peut être aussi simple que d’accepter les possibilités métaphysiques et de s’ouvrir à la communauté. La méconnaissance de la nature des choses est considérée comme de l'ignorance. Storm et Lightning sont tournées face à la caméra et nous invitent dans la danse, sans toutefois insister. Il n’est pas question de recrutement évangélique. Les infidèles ne sont pas abattus; ils sont vus comme des personnes effrayés, pitoyables et laissées à elles-mêmes. Les autres doivent simplement « attendre que les autres soient prêts » (et ainsi mettre fin à leur altérité).

À la fin de la vidéo, Lightning dit, « … nous dansons dans le firmament, vainqueurs ». En dépit des opposants et non-croyants, elles et tous ceux qui croient, participent et vivent avec leur dualités et dans l’interdépendance de tous les éléments, subsisteront.

Lightning propose que cette construction de l’identité par le refus de la métaphysique et de ses expressions sociales repose dans la peur. Peut-être que Claxton caractérise cette opposition de mâle (« boules de poil! »), ou du moins de masculine. Mais ce n'est pas nécessairement le cas. Lorsque je l’ai questionnée à ce sujet, elle n’allait pas dans ce sens. Elle m’a expliqué que les chats effrayés désignent les personnes qui ont peur des cosmologies et des rituels autochtones.7

Vers la fin de la pièce, Lightning désigne la foudre qui approche, dirigée par Storm qui lui est également assujettie et qui en est submergée, comme « ce moment d’espoir, ce moment de promesse, ce moment d’amour, ce moment de connectivité… » Selon Claxton, ce moment désigne la danse du soleil dans laquelle tous les éléments s’unissent :

Je pratique la danse du soleil depuis un certain temps et maintenant, les êtres du tonnerre et de la foudre doivent entrer dans la danse et un orage doit se manifester. La foudre frappe, le tonnerre le résonne et la pluie purifie. Ils font leur entrée, le cosmos, comme le soir avant le tournage (ce qui est rare à Vancouver) où une énorme éclair suivie d’un coup de tonnerre et de la pluie ont réveillé Marie Prince. Les éclairs illuminaient sa chambre. Storm a également eu une expérience semblable. Pour ma part, j’ai dormi pendant tout l’orage... puisque deux jours plus tôt je rentrais chez moi après avoir participé à la danse du soleil et j’avais besoin d’un long repos.

Grâce à la danse du soleil, je conserve et améliore ma propre relation avec le cosmos et le divin. Elle me donne de la force, une force spirituelle et une connectivité à ce royaume, en plus de solidifier mes liens familiaux en Saskatchewan et dans le Dakota du Sud.

«The Patient Storm » a été écrite pour franchir les frontières et nous encourager à aller au delà des frontières qui séparent : les gens, les peuples, ainsi que la métaphysique et la spiritualité.8 C’est une légende moderne qui fait écho du passé afin de révéler la danse commune derrière toutes les apparences.

Photo de production no 4 : Plongée verticale en noir et blanc de la production de Tempête, tu nous guettes!

Lorsque je regarde « The Patient Storm », mon odorat distingue une odeur dans le vent : une odeur de chaleur, légère, douce qui présage une clameur glorieuse. Je sens l’accalmie; l’épuisement d’après bataille et une grande envie de me retrouver à la maison. Mais rien n’est comme avant. Est-ce le temps de passer de la poussée d’énergie rouge de la droiture, des outils de lutte aux outils de reconstruction? Dana Claxton offre l’espoir et la possibilité.


David Garneau
Octobre 2006
Regina, Saskatchewan



« The Patient Storm » est le projet de vidéo en ligne de Dana Claxton, mise en service par Urban Shaman dans le cadre du projet Les Esprits de la tempête.

2 On peut citer de nombreuses sources. En voici une récente : Greg Young-ing, « The Indigenous tradition/New Technology Interface » Transference, Tradition, Technology : Native New Media Exploring Visual and Digital Culture. Walter Phillips Gallery Editions Melanie Townsend, Dana Claxton, Steve Loft eds. 2005. p. 179-187.

3 « L’oeuvre porte précisément sur la danse du soleil. Lorsque Ahawsis m’a invitée à y participer, et que j’ai lu à propos de l’intention de l’œuvre, la première image qui m'est venue à l'esprit est celle de la danse du soleil et de la formation de l’orage et des nuages que j’avais observés. L’enseignement des Lakotas, « tout ce que l’on doit savoir se trouve dans le ciel », m’est également venu à l’esprit (tirée d’une correspondance avec Dana Claxton).

4 La Chaise est une chaise de forme organique qui nous invite autant à s’y assoire qu’à s’incliner. Conçue par Charles et Ray Eames (1948) pour un concours d’un musée d’art moderne, elle est inspirée par « Floating », une sculpture de Gaston Lachaise.

5 Toutes les citations de Dana Claxton sont tirées d’une conversation par courriel électronique que j’ai eue avec elle pour la préparation de cet essai.

6 « Storm est interprétée par Salish de la réserve Capilano et Marie Prince vient de Carrier country dans le Nord » (Dana Claxton).

7 « Certainement... les « autres » sont les personnes anti-Autochtones et les boules de poil sont des froussards… mâles et femelles... peut-être davantage masculins dans ce texte… » (Dana Claxton).

8 « Claxton décrit ses deux nouvelles œuvres comme une tentative de construire une approche religieuse qui croise un processus culturel de la création d’art contemporaine et du savoir traditionnel en créant un site dans lequel entrent en contact deux façons différentes en apparence de connaître ou d’être ». « Artist statement » de Dana Claxton, ArtSpeak Gallery. Mai 2000, citée dans Monika Kin Gagnon, « Worldviews in Collision : Dana Claxton’s Video Installations » de Monika Kin Gagnon, Transference, Tradition, Technology : Native New Media Exploring Visual and Digital Culture. Walter Phillips Gallery Editions, Melanie Townsend, Dana Claxton, Steve Loft eds. 2005. p. 70.



Autres collaborateurs


Service de traduction : Le Groupe-conseil baastel ltée



NOTICE BIOGRAPHIQUE

David Garneau est professeur agrégé d’arts visuels à l’université de Regina. Il est titulaire d’un baccalauréat en beaux-arts (peinture et dessin) et d’une maîtrise en littérature américaine, tous deux de l’université de Calgary. David est natif d’Edmonton où il a grandit, a habité vingt ans à Calgary et vit maintenant à Regina depuis 1999.

David Garneau se dédie à la peinture, au dessin, à la conservation et à l’écriture critique. Son exposition personnelle « Cowboys and Indians (and Métis? » est actuellement en tournée au Canada. Garneau jette souvent à travers ses œuvres un regard sur la nature, la perception, l’histoire, la masculinité et la négociation concernant l’identité des Blancs, des Autochtones et des Métis. Il a organisé deux grandes expositions collectives à Calgary, « The End of the World (as we know it) » et « Picture Windows : New Abstraction, » et quatre autres à Régina, « Transcendent Squares », « Sophisticated Folk » et « Contested Historie » pour la Art Gallery of Regina, et « Making it Like a Man » pour la Mackenzie Art Gallery. Il explore actuellement le Chemin de Carleton comme sujet de paysage et sujet historique et les animaux tués sur la route comme sujet de paysage et de nature morte.



David Garneau se dédie à la peinture, au dessin, à la conservation et l’écriture critique au sujet des arts visuels. Parmi ses expositions personnelles citons « Sex, Violence and the Death of Heroe », « Peripheral Picture » et « Cowboys and Indians (and Métis?) ». Garneau jettent souvent à travers ses oeuvres un regard sur la nature, la perception, l’histoire, la masculinité et la négociation concernant l’identité des Blancs, des Autochtones et des Métis. Il a organisé deux grandes expositions collectives à Calgary « The End of the World (as we know it) » et « Picture Windows: New Abstraction », et deux à Régina, « Transcendent Squares » (Rosemont Art Gallery) et « Making it Like a Man » une exposition et conférence nationales pour la Mackenzie Art Gallery. Il explore présentement les animaux morts sur la route comme sujet de nature morte et travaille à l‘organisation de deux expositions pour 2005 à la Rosemont Art Gallery : « Sophisticated Folk » et « Contested Histories » produites par le Sâkêwêwak Artists' Collective.

David écrit sur l’art depuis dix-sept ans. En 1989, de concert avec Mary Beth Laviolette et Paula Gustafson, a co-fondé et co-édité le magazine Artichoke. Il a été rédacteur en chef occidental du magazine C (1995-1999), et est le co-fondateur et rédacteur en chef de Cameo, un magazine sur l’art, la musique et la mode (1995-1997). Il a écrit des essais sur des artistes tels que : Peter von Tiesenhausen, Michael Campbell, Carroll Moppet, Greg Payce, Catherine Burgess, Martha Townsend, Wyn Gelyense, Dick Averns, et Walter May. Il a écrit des compte-rendu pour des journaux locaux de Calgary et des magazines d’art nationaux dont : C, Fuse,Vanguard, BorderCrossings, Vie des Arts, Canadian Art, Ceramics: Art and Perception, Parrallelogramme… David a donné son atelier A Thousand Word Exactly : Writing About the Visual Arts for Publication, à Calgary, Saskatoon, Regina, Fort MacMurray, Windsor, London et Red Deer.